lundi 31 mars 2008

Tibet: la fin du toît du monde ?


Imaginez-vous ce paysage truffé de mines de cuivre ? C'est pourtant ce qui pourrait bientôt arriver.



Un jour, il n’y a pas si longtemps, moins d’un demi-siècle en fait, le peuple Tibétain vivait tranquillement loin du monde, protégé par les montagnes et ses traditions. Un peuple tourné tout entier vers la recherche de la paix intérieure, de la liberté de l’esprit, dans ces hauteurs inaccessibles où prennent naissance les neufs plus grands fleuves d’Asie, comme un trésor inviolé qui se cache de la cupidité de l’Homme et de son désir de pouvoir. Depuis toujours ou presque, il vivait au rythme des saisons, en oubliant les richesses minières et métallurgiques de ses rochers, préservé de la frénésie sauvage de ses voisins par le regard bienveillant de ces sages immortels qui reviennent à chaque fois pour aider à comprendre le silence des cimes enneigées balayées par le vent.

Et puis, les chinois sont arrivés, sans prévenir, sans comprendre, sans respect, sans compassion, poussés par la force aveugle d’une nation millénaire qui se multiplie à l’infinie, qui s’étend toujours plus loin pour ne pas étouffer sous son poids.
Un jour, ils sont arrivés et ils ont tout écrasés, tout cassés, avec une volonté farouche d'effacer la culture d'un pays autonome pour la reconstruire à leur image, négligeant la mémoire d’un peuple qui ne demandait qu’à s’intégrer pour ne pas disparaitre sous la direction d'un leader politique et spirituel tourné vers l'avenir. Un jour, ils ont tout balayé et nous n’avons rien dit, rien fait. Nous, moi, eux, le monde, la France, la patrie de la liberté, de l’égalité, de la fraternité, nous avons même refusé de recevoir officiellement le dalaï-lama pour ne pas risquer le pire, la guerre d’abord, puis ce marché gigantesque où l’on peut tout acheter et tout vendre. Comme si l’on pouvait se boucher les yeux devant l’évidence.


Hier, ce palais abritait le symbole d'un peuple tourné vers la spiritualité et la paix intérieure. Désormais, c'est une coquille vide de sens que les touristes visitent sous la direction de l'envahisseur chinois.

Aujourd’hui, sous les feux des projecteurs, à la veille de cette fête qui célèbre la fraternité des nations à travers le sport, le peuple Tibétain crie pour qu’on se souvienne de lui, pour qu’on le reconnaisse, pour qu’on l’aide à résister à cet envahisseur sauvage et sans vergogne qui refuse à cette culture le droit d’exister librement, loin de la fourmilière inconsciente que l’on manipule à ses côtés. Menacés par les milices chinoises, les moines bouddhistes tentent de faire entendre la voix d'un peuple que l'on cherche depuis trop longtemps à éparpiller pour mieux en effacer les caractères culturels.

Mais qu’allons nous faire ? Que pouvons-nous entreprendre pour redonner courage aux tibétains ?

La réalité politique chinoise est complexe, mais il est plus que probable que nos hommes politiques ne feront pas grand chose, laissant le soin aux associations de défense du Tibet de s'émouvoir de cette situation qui dure depuis déjà trop longtemps.

Pour la forme, notre gouvernement se contentera sans doute de protester mollement. Peut-être fera t'il mine de boycotter une cérémonie d’ouverture des Jeux Olympiques, symbole de la fraternité entre les peuples qui perd tout son sens devant les corps des manifestants qui s’affaissent loin des yeux de la presse internationale. En attendant, nous allons laisser la Chine nous faire part de son « très fort mécontentement » après la déclaration de l’Union Européenne qui demande la « transparence de l’information ». Nous allons laisser les diplomates chinois nous rappeler que « la question du Tibet est une question interne à la Chine » et « qu’aucun pays étranger ni aucune organisation internationale n’a le droit de s’y ingérer. » Comme si le Tibet n'était pas une nation à part entière.

Si nous ne faisons rien, nous allons oublier que ce sont des hommes et des femmes que l'on arrête, des êtres humains qui meurent au Tibet aujourd'hui, que ce pays n’appartenait pas à la Chine il n’y a pas si longtemps, que c’est une culture millénaire, tournée vers la vie spirituelle qui s’éteint, pour continuer à vendre des avions, des trains, des réacteurs nucléaires et des voitures. Pour continuer à acheter des lunettes noires, des vêtements au rabais, des jouets dangereux, des babioles et toutes ces choses, plus ou moins utiles que nous ne savons plus produire.

Évidemment, il y a le nombre : ils sont plus d’un milliard lorsque les Tibétains ne sont que quelques millions. Et bientôt, si nous ne faisons rien, ils ne seront plus là pour nous faire réfléchir, pour conserver une certaine vision de l’humanité à l’abris de notre société de consommation, du capitalisme, des crises boursières et des montres de luxe, vraies ou fausses, qui égrènent le temps qui nous éloigne chaque jours un peu plus de la sérénité. Bientôt, il n’y a aura plus que le rouge d’un drapeau conquérant à la place des robes safran des moines, et les montagnes seront truffées de mines de cuivre et de cobalt. Des tréfonds de ce qui fut un jour le socle de notre monde, on fera remonter l’uranium qui nourrira comme un monstre taché de sang nos centrales nucléaires.

Ce soir, je ne me reconnais pas dans ce monde. J’ai honte d’en faire partie. Car quoi qu’on en dise, ici et ailleurs, dans l’ignorance ou dans la lumière, l’Homme continue à se détruire sans conscience. Comme si le monde que nous laisserons demain à nos enfants n’avait plus d’importance.

Messieurs les politiques, aidez le Tibet maintenant. Demain, il sera trop tard.


Vers le site de l'association France Tibet